Clay Philippe

L'illusionniste

Clay Philippe


De son gilet, de son chapeau
Il fit sortir des rois, des dames
Des valets, des as en troupeau
De son gilet, de son chapeau
J'en eus des frissons sous la peau
Il fit sortir des rois, des dames
Parmi les rubans, les drapeaux
Qui s'échappaient de son chapeau

D'ores et déjà la foule applaudissait
«Bravo ! Mais c'est extraordinaire, 
J'avais vu ce numéro en dix-neuf cent cinquante-quatre
À Cannes. Vous allez voir, c'est inouï !»

De mon chapeau, de mon gilet
Il fit jaillir mon portefeuille
Mon mouchoir, mes gants et mes clefs
De mon chapeau, de mon gilet
J'en avais la chair de poulet
Il fit jaillir mon portefeuille
Parmi les rires, les quolibets
Qui s'échappaient en chapelet

D'ores et déjà la foule trépignait
«Mais c'est inouï
Mais c'est absolument extraordinaire !
Vraiment, il est sensationnel
Avouez, oh ! C'est inouï !»

Prenant plaisir à m'affoler
Il a décroché mes bretelles
Et devant mon air désolé
Prenait plaisir à m'affoler
Pas besoin d'être bachelier
Pour deviner que sans bretelles
Un pantalon, c'est régulier, 
Finit toujours sur les souliers

D'ores et déjà la foule suffoquait
«Oh ! Mais c'est absolument extraordinaire
Mais regardez c'pauv' type !
Oh ! Et la ch'mise, la ch'mise !
Oh, c'est inouï !»

Et je revins à mon fauteuil
Sous la risée que je déchaîne
Sans argent, sans clefs, sans orgueil
Et je revins à mon fauteuil
Sans mouchoir et la larme à l'œil
Traînant ma défroque à la traîne
Du spectacle j'ai fait mon deuil
Car on m'avait pris mon fauteuil !

Mon fauteuil !
Mais c'était à moi, c'fauteuil !
Mais c'est mon fauteuil, ça !
Oh, ben oh, mon fauteuil !

Pardon, Monsieur, la sortie, s'il vous plaît ?
Merci