Blanches et fines sont les mains Des vieux intellos dans les trains Que disent-elles ? Ne disent rien Elles se taisent, elles sont bien L'une sur l'autre posément Sur la serviette en caïman Elles se reposent Elles ne font rien Les mains des maîtres dans les trains Je les regarde et j'imagine La vie de ces mains de platine Combien de livres Combien de corps Ont-elles couverts qu'elles aiment encore ? Sont-elles pauvres ou sont-elles riches D'un grand amour ou d'une friche ? Longues et belles, Qu'ont-elles tenu, Qu'ont-elles gardé, qu'ont-elles perdu ? Blanches et fines sont les mains Des vieux intellos dans les trains Rêve de paresse Quête de somme Chiffres ou lettres qu'ont fait ces hommes Qu'ont-ils fait, que n'ont-ils pas fait Pour avoir ces mains de parfaits Ces pattes lisses De musicien De prof ou de politicien ? Je les regarde et je devine Des lignes de fuites qui me font signe Entre les pièges Qu'elles ont déjoués Et les manches qu'elles n'ont pas jouées Contre la terre et des outils Contre la poussière de la vie Qui se dépose Qui s'accumule Se décompose et nous macule Mais blanches et fines sont les mains Des vieux intellos dans les trains Que disent-elles ? Tout un tintouin Tout un toutim à mon calepin Je les regarde et je dessine Des signes de ma vie dans leurs lignes Des ailes d'ongles pâles, de griffes Voguant sur l'onde d'un certif Je les regarde et je repense À toutes les mains de mon enfance Blanches de lessive Ou noires de suie Dures à la tâche mais douces, douces Blanches de lessive Ou noires de suie Dures à la tâche, douces à mes tifs