Il m' regardait J' me détournais Il m' souriait J' m'en empêchais Et il m'a dit en se penchant "La fumée, s'il vous plaît, est-ce qu' ça vous déplaît ? Vous fumez ? Permettez ! Alors, c'est parfait Voulez-vous mes journaux car le temps est long ? Pour le tuer, parlons donc, wagons longs de lit" On s'est connus dans le wagon de lit de long Le wagon long, le wagon long de nuit Du Paris - Lyon - Marseille - Menton qui file de nuit Et nous emporte vers l'Italie On s'est souri Dans les sanglots de lit de long, les sanglots longs Du wagon long de nuit Et il m'a dit au creux d' l'oreille "Dites-moi tu, dis-moi toi, j' vous dirai pareil À quoi bon nos prénoms Appelez-moi chéri Appelle-moi mon amour On s'connaît à peine Qu'on s' dise vous, qu'on s' dise tu Qu'importe, pour une nuit ?" Dans le wagon de lit de long, passé minuit On s'est aimé, aimé à la folie Le Paris - Lyon - Marseille - Menton toute la nuit Nous emportait vers l'Italie On s'est aimé dans les sanglots de lit de long Les sanglots longs des wagons longs de nuit Et je lui dis au creux d' l'oreille "Être à tu, être à toi, être vous et moi Quand on n' se connaît pas À tu et à toi Savez-vous, sais-tu bien, qu' j' suis follement émue D'être à vous, d'être à tu, d'être dans vos bras" Le lendemain, il m'a souri "Adieu chérie J' descends ici J' te quitte à Vintimille" Le Paris - Lyon - Marseille - Menton de lit de long De long de lit m'a emportée, nous séparant Vers le soleil à tout jamais Bien loin, bien loin, vers l'Italie