Je cache l'aventure à l'intérieur de moi J'ai fait trois fois le tour de la rue des Abbesses A l'heure du whisky, à l'heure de la messe On peut toujours trouver beaucoup plus grand que soi L'aventure, la voilà... à portée de la main Garde ton coeur à gauche et tes deux pieds sur terre Là, tu verras d'un coup s'effacer les frontières L'aventure est chez toi mais tu n'en savais rien Il suffit de partir sur des souliers trop grands De marcher sur les eaux, des ailes autour des tempes De boire des images et de mordre les vents De chercher dans le noir des gueules de sa trempe Il suffit d'être seul et de tenir debout Au milieu de tous ceux qui gueulent et qui vacillent Va ton chemin tout droit, l'aventure est au bout Et tu verras que l'or n'est jamais ce qui brille Fais le tour de la Terre avec dix francs sur toi Va-t'en planter des choux au coeur de la savane Fabrique des légendes avec tes gueules de bois Va-t'en faire un tabac un soir à La Havane Et puis reviens chez toi avec des rides en plus La gueule boucanée comme sur les images Jette ton sac à dos et viens poser ton cul On se partagera le rouge et le fromage Il m'arrive parfois, rien qu'à te regarder, De franchir d'un seul coup la muraille de Chine Sauter trois océans sans quitter mon quartier Ce que je ne vois pas d'ailleurs, je le devine L'aventure se réveille à l'odeur de ta peau Au milieu de ton lit, je trouve des navires Le vent dans tes cheveux fait claquer les drapeaux Et quand l'amour fleurit... je n'ai plus rien à dire Voir courir devant soi les bisons de Lascaux Sur un papier de riz, écrire la carmagnole Boire de la mirabelle dans les bars de Frisco Le soir à Varsovie, danser la farandole Voir enfin de ses yeux ce qu'on n'a jamais vu A trois heures du matin, voir des anges à Pigalle Mon aventure à moi, c'est ce que j'ai voulu Etre pour tous les cons un objet de scandale Un soir en descendant la rue du Mont-Cenis J'avais peut-être un peu forcé sur la bouteille J'ai vu trois caravelles cingler sur Tahiti Depuis, cette rue-là pour moi n'est plus pareille J'y vais boire l'apéro avec des conquistadors Dont aucun n'a jamais découvert l'Amérique On mélange à plaisir les vivants et les morts Et quand on s'est tout dit... il reste la musique