Serge Lama

Moyennant quoi

Serge Lama


Tu la couvres, c'est vrai, de bijoux, de fourruresTu lui changes, c'est vrai, chaque année sa voitureTu es tombé dans sa vie comme le Père NoëlLes doigts pleins de cadeaux et le cœur paternelUne fois tous les mois tu l'emmènes au théâtreDroite et belle et fardée comme une femme en plâtreTu organises tout, tu décides et tu tranchesEt sa petite main vient mourir sur ta mancheMoyennant quoi, toi, tu la penses heureuseMoyennant quoi, tu la penses amoureuseNe vois-tu pas cette ombre au fond de son regardEst-ce l'ombre des cils ou un peu de brouillardMoyennant quoi tu en as fait ta choseMoyennant quoi, quand elle a l'air moroseTu penses simplement qu'un des enfants va malEt qu'elle s'inquiète un peu et que c'est bien normalTu me couvres, c'est vrai, d'un mépris confortableA l'école déjà, je portais ton cartableJ'étais déjà tout seul mais protégé par toiMais je ne suis pas là pour te parler de moiJe ne suis venu que pour te parler d'elleC'est l'amour et lui seul qui m'a donné mes ailesEt te dire tout haut ce que son cœur te cacheIl fallait bien qu'un jour ou l'autre tu le sachesMoyennant quoi, puisque l'on se ressembleMoyennant quoi, nous partirons ensembleEt même si malgré tout elle restait chez toiPar lâcheté, du moins que tu saches pourquoiMoyennant quoi, nous serons enfin libresOu de mourir ou de tenter de vivreOn n'en peut plus, tu sais, de cette tyrannieA partir d'aujourd'hui, dis-toi que c'est finiMoyennant quoi, on fera ce qu'on aimeEt l'on assurera seuls nos problèmesTu peux sourire de ton sourire protecteurJ'ai dépassé le cap où tu me faisais peurMoyennant quoi, on deviendra splendidesAprès des siècles et des années de videOn deviendra ce qu'on était au fond du cœurMoyennant quoi, sans toi, on deviendraUn homme et une femme.