Les matins où le jour se lève Avec mauvaise volonté Lorsque je m'entonne du thé Pour me désengluer d'un rêve, Par ces matins de bouche amère Où le suicide a des attraits Sans que j'en puisse voir les traits Auprès de moi se tient ma mère. Elle est venue du cimetière Où l'an mil neuf cent trente-six Après un bref De Profundis On l'a couchée dessous la pierre, Moi qui la croyais feuille morte L'humus d'où jaillit le printemps, Voilà qu'après plus de trente ans Elle a bien su trouver ma porte Elle me regarde en silence Sans avoir contour ni linceul, Je fais bien semblant d'être seul Mais je me heurte à sa présence, Je ne suis plus cet enfant sage Qu'elle avait nourri de son sein Pourquoi vient-elle ? En quel dessein ? Et pour me dire quel message ? Dis-moi, viens-tu chercher mon âme Ou simplement la surveiller ? Mes enfants vont se réveiller Et je dois réveiller ma femme, Va-t'en maman, le jour va poindre, Un jour de plus, un jour de moins, Entre nous soit dit, sans témoin, Je me prépare à te rejoindre.