Ô ma douceur Je rentre à la maison L'âme et le pantalon Débraillés J'ai bu comme un siphon J'ai la bouche en chiffon Je reviens sans un rond Nettoyé Le nez en couleur Et le teint rubicond Je rentre à reculons Au foyer Implorant ton pardon Dans une sourde oraison De hoquets, de jurons Émaillée Ô ma douceur Ô ma douceur Je rentre mais c'est long Et j'en crache mes poumons D'être à pied J'ai l'hiver aux talons Et mon pauvre veston Dans son rang de boutons Veut bailler Un fond de liqueur Et je tiens le ponpon Je risque le plomb À brailler Et le ciel me répond Une pluie de postillons C'est un temps de saison Vous croyez? Ô ma douceur En passant sur le pont Je me dis: À quoi bon Et puis: Allons, allons Je riais Et voilà que je pleure Comme un petit garçon Dans les bras d'un piéton Effrayé Il me remet d'aplomb Car cet homme est maçon Et moi, comme un pinson Égayé Par son petit flacon Je rentre à la maison L'âme et le pantalon Débraillés Ô ma douceur Puis le jour moribond Revient de l'horizon Pour battre les buissons Les clapiers Moi je baisse le front Comme un pilleur de troncs Je rentre à la maison Dévoyé Ô ma douceur J'ai peur de l'abandon Je rentre à la maison Te choyer Ô ma douceur Ô mon doux compagnon Mon toutou de salon Je rentre à la maison Je rentre à la maison Je rentre à la maison Ô ma douceur